Si vous êtes un peu branché(e) psy ou si vous avez des ami(e)s qui… Vous avez certainement entendu parler de l’EMDR, cette forme de thérapie assez récente qui semble donner des résultats assez spectaculaires en peu de temps. Comment ça marche?
Une thérapie brève et efficace. Tous ceux qui ne sont pas super bien dans leur peau ou qui connaissent un passage à vide en rêvent. Il semble bien que l’EMDR (« Eye Movement Desensitization and Reprogrammation ») – dont « tout le monde parle », réponde de manière assez spectaculaire à ce défi.
Son efficacité a été découverte par hasard
Fin des annéees 90, l’Américaine Francine Shapiro se promenait au bord d’un lac en rabâchant sa petite dose de pensées négatives. Machinalement, elle se met à observer ce qui se passe autour d’elle, à gauche, à droite. Puis se rend compte tout à coup que ses préoccupations ont quasiment disparu. Mais aussi que, de retour dans ses pensées, celles-ci ont perdu énormément de leur charge émotionnelle.
Une chance pour nous: Françoise Shapiro est une thérapeute qui a pris l’habitude d’observer son propre comportement psycho-émotionnel et de le décoder.
Après divers tests sur elle-même, elle en arrive à un constat: lorsqu’elle bouge rapidement les yeux de droite à gauche, ses obsessions ou sentiments handicapants s’estompent.
Suivez le doigt et ça marche!
Elle rameute alors ses amis pour tester sur d’autres. Ceux-ci sont invités à se concentrer sur une source de préoccupation en regardant à gauche puis à droite, etc.
Comme ce va-et-vient des yeux n’est pas évident, elle le favorise en bougeant l’index de gauche à droite devant le visage de ses cobayes.
Ces expériences confirment: l’idée noire l’est beaucoup moins après cet exercice.
Francine Shapiro constate ensuite qu’une procédure complémentaire est nécessaire pour fixer le bénéfice dans le long terme.
Elle observe aussi que les résultats sont comparables en jouant sur les sons (oreille gauche-oreille droite) ou en envoyant des petites impulsions alternativement dans la main gauche puis la main droite ou encore en tapotant sur un genou puis sur l’autre. Bref, en sollicitant le corps de gauche à droite assez rapidement.
Comme dans le sommeil paradoxal!
Il n’y a pas encore d’explication absolue. Mais on pense qu’il s’agit du même phénomène réparateur que dans la phase de sommeil paradoxal quand le mouvement de nos yeux s’accélère.
- Ce mouvement jouerait un rôle dans le tri de l’information.
- La stimulation alternée des hémisphères droit et gauche du cerveau libérerait des images restées coincées dans le cerveau émotionnel pour les faire passer à un niveau de réflexion plus « raisonnable ».
Les modifications intervenues dans le cerveau se mesurent d’ailleurs objectivement via le petscan, explique une psychothérapeute: « Avant une séance d’EMDR, le cortex frontal de la personne est inactif lorsqu’elle évoque son traumatisme alors que son amygdale, centre des émotions, est activé. A l’issue de la séance, c’est le contraire ».
Comment ça marche?
- Il y a d’abord la phase de préparation pendant laquelle le thérapeute établit une relation de confiance avec le patient et tente de cibler avec lui un évènement traumatique.
- Vient ensuite la phase de désenbilisation: celle-ci consiste en séries de mouvements oculaires (ou impulsions auditives ou tactiles, au choix) avec la pensée centrée sur l’événement traumatique. Ces séries sont entrecoupées de pauses permettant au patient de s’exprimer et au thérapeute d’évaluer le degré progressif de détachement de celui-ci mesuré sur une échelle de 0 à 10. L’événement est considéré comme intégré de manière acceptable lorsque le niveau de perturbation qu’il suscite est proche de zéro.
- Vient ensuite l’étape d’installation qui consiste a ancrer la nouvelle croyance positive.
Pour quel genre de problème l’EMDR est-il efficace?
- Cela fonctionne pour un choc traumatique ou une phobie. Par exemple, une personne qui n’avait plus osé reprendre le volant depuis plusieurs année suite à un accident de voiture, s’est débarrassée de cette hantise avec des séances d’EMDR. L’explication des thérapeutes EMDR: un message négatif paralysant était resté bloqué dans son cerveau émotionnel: « Je n’ai rien contrôlé. J’aurais dû voir ». Son travail EMDR s’était terminé sur cette conviction, élaborée par lui-même: « c »est fini. Aujourd’hui, je vois clair et je suis bien attentif ».
- Mais aussi pour des blessures plus profondes. Une thérapeute cite l’exemple d’une dame qui, brillante professionnellement, ne comprenait pas pourquoi elle se laissait bafouer dans sa vie privée. Sa mère lui avait dit un jour impulsivement: « Ce n’est pas possible que tu sois ma fille! ». Elle en avait intégré comme cognition négative excessive et toxique: « je ne vaux pas la peine d’être là ». La phrase positive qu’elle a finalement choisie est: « J’ai de la valeur et j’ose prendre ma place dans ma vie privée ». Cela a changé profondément sa relation avec sa mère, qui était très conflictuelle, ainsi qu’avec son proche entourage.
En combien de séances?
- Un traumatisme peut être résolu en deux ou trois séances.
- Mais chez les personnes fragilisées, il y a souvent plusieurs expériences ayant laissé des traces. Cela prend un peu plus de temps. Il est rare qu’on dépasse dix rendez-vous.
Deux thérapeutes témoignent des résultats
- « Je suis réellement étonnée des résultats obtenus dans la résolution de certains traumatismes ou phobies mais j’observe aussi des dénouements spectaculaires chez des personnes qui étaient en thérapie chez moi depuis un certain temps », commente l’une d’elles. Elle a suivi une formation en EMDR après avoir lu « Guérir… », le best-seller de David Servan-Schreiber, qui a fortement contribué à faire connaître cette méthode en Europe.
- « Je rentre d’un séminaire consacré à l’EMDR et je suis enthousiaste », confie une autre psychothérapeute d’expérience, qui, elle aussi, utilise maintenant l’EMDR dans son travail thérapeutique. Et de poursuivre: « Je suis impressionnée, avec mes patients, par la grande capacité d’autoguérison qu’elle aide à déclencher. Celle-ci se manifeste par la disparition de certains symptômes et une amélioration des performances mais aussi par un meilleur équilibre corps-esprit ou encore la restauration d’un sentiment d’unité chez la personne et de la sensation d’avoir un pouvoir déterminant sur sa vie ».